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La construction de la protection sociale en RDC

I. Contexte général

Le document de la Politique Nationale de la Protection Sociale en République Démocratique du Congo (RDC) se rédige dans un contexte tant international que national nécessaire à éclairer en quelques points. Pour le saisir pleinement, il est utile de dépasser le contexte strict de la Protection Sociale.

1.1. Contextes et situations à l’échelle mondiale

1.1.1. Vue d’ensemble
Le contexte à l’échelle mondiale peut être saisi à travers cinq incertitudes fondamentales qui traversent toutes les sociétés, du Nord au Sud, d’Est en Ouest. Ce sont des incertitudes qui affectent, d’une manière ou d’une autre, la RDC : incertitude environnementale (changement climatique, crise énergétique, menace sur la biodiversité), incertitude démographique (urbanisation rapide, doublement de la population africaine d’ici 2050), incertitude économique (crise financière, émergence de nouvelles puissances, poids grandissant des entreprises transnationales, concentration des richesses), incertitude politique (montée en force des fondamentalismes, essoufflement des modèles démocratiques représentatifs) et incertitude technologique (manipulation du génome, dépendance vis-à-vis des nouvelles technologies). Ces cinq incertitudes, d’un côté, inquiètent mais, en même temps, d’un autre côté, elles mettent en lumière un certain nombre de dynamiques positives qui redonnent des couleurs à l’espérance. Car, partout dans le monde, des groupes, des communautés, des collectivités affrontent ces incertitudes avec courage et créativité.

Sur le plan économique, de manière générale, on constate partout dans le monde la montée en puissance du néolibéralisme comme modèle hégémonique, un modèle qui fait la part belle aux gagnants du jeu économique, en général les riches qui l’emportent aux dépens des pauvres et des vulnérables. Dans son sillage, ce modèle promeut implicitement une certaine conception du monde et un certain genre d’individus. Ce sont des individus davantage centrés sur leurs intérêts, vivant dans l’immédiat, peu soucieux du sort réservés aux perdants du système. Le néolibéralisme ne cherche pas seulement à autonomiser les marchés et à réduire au minimum l’intervention de l’Etat, il vise aussi la transformation des manières de vivre et des valeurs en société. En particulier, il met en difficulté les institutions et dispositifs de solidarité en même temps qu’il entrave la redistribution des richesses en promouvant la compétition comme mode de vie en société.

C’est pourquoi, partout dans le monde, l’enjeu de la solidarité devient de plus en plus crucial, quelle que soit l’échelle considérée, quel que soit le contexte. C’est pourquoi aussi la « réinvention » et la généralisation d’une nouvelle culture de la solidarité devient pressante. Partout une double tâche attend tous ceux et toutes celles qui sont soucieux de progrès dans le « vivre ensemble » : d’un côté, il faut déconstruire un monde désormais trop incertain, de l’autre il faut en (re)construire un nouveau, porteur d’espoir et d’avenir pour tous et toutes.

C’est dans cette logique que des avancées en matière de Protection Sociale sont attendues. En effet, la Protection Sociale est l’une des voies privilégiées par lesquelles un Etat peut à la fois prendre soin de sa population et reconstruire la solidarité qui fonde la Nation qu’il incarne.

Le défi est cependant ambitieux et la conjoncture délicate. En effet, d’après le rapport mondial publié en 2015 par l’OIT, quelques 122 pays auraient réduit leurs dépenses sociales depuis 2010 dans le sillage d’une politique de réduction des dépenses publiques dont les plus pauvres font les frais. Les coupes, parfois engagées sous couvert de programmes d’austérité, visent notamment les subventions, les investissements, prestations ou services rendus dans des secteurs tels que la santé, l’éducation ou l’aide sociale1. Cette tendance est à souligner alors que de manière générale, la contribution des pays africains n’est guère élevée (sauf le Lesotho ou l’Afrique du Sud, elle ne dépasse pas 8% et pour la plupart s’élève à moins de 5%, moins de 3% pour la RDC). Pour les pays qui ont adopté des politiques de Protection Sociale, l’accent est placé sur les plus vulnérables, les politiques de gratuité des soins de santé, plus rarement sur des programmes de transfert monétaires.

En même temps, la tendance mondiale est à l’accroissement des inégalités, en particulier l’écart entre les riches et les pauvres. En Afrique, la situation est toutefois contrastée : cette tendance se vérifierait de manière flagrante dans des pays tels que le Ghana, le Burundi, la Côte d’Ivoire, le Niger,… (pour le période 2000-2008) mais moins nettement dans d’autres tels que l’Ouganda, le Kenya, le Sénégal,… (pour la même période 2000-20082). Or, en même temps, près de 40% de la population mondiale échappe à toute couverture des frais de santé, ce qui signifie que les ménages les supportent, tant bien que mal. De manière générale, partout dans le monde, une masse grandissante de pauvres sont contraints de faire face seuls aux risques de la vie.

1.1.2. Initiatives et engagements en Afrique en matière de la Protection sociale

Depuis les années 2000, les pays africains ont pris une série d’engagements en faveur du développement de mesures et d’institutions de Protection Sociale. Cela se vérifie à la lumière de diverses conférences ou déclarations, notamment les suivantes qui ont eu un grand retentissement :

La Conférence le Livingstone (Zambie) du 23 mars 2006 sur la Protection Sociale qui a mis en avant l’importance des transferts sociaux pour lutter contre la pauvreté. Cette conférence de trois jours réunissant 13 pays africains s’est clôturée sur un appel pour l’action insistant sur l’élaboration de plans de transferts sociaux nationaux. Ses participants ont préconisé la mise en place générale d’un ensemble de prestations sociales de base; La session de la Commission de l’Union Africaine en charge des affaires sociales en date du 28 au 31 octobre 2008 à Windhoek (Namibie) qui visait à jeter les bases d’un cadre de politique sociale pour l’Afrique en examinant plus particulièrement 15 grands domaines d’action ; Le 2ème Colloque africain sur le travail décent (Yaoundé/Cameroun) en date du 06 au 08 octobre 2010 qui avait comme thème « construire un socle de protection sociale avec le Pacte mondial pour l’emploi ». Le Colloque s’est attaché à définir, dans les contextes africains, les dimensions verticales et horizontales du socle de la Protection Sociale, à promouvoir la convention n°102 de l’OIT ; La Conférence de Cap Town (Afrique du Sud) sur la protection sociale des enfants en date du 28 au 30 avril 2014 qui a fait des enfants, de leur éducation, leur santé et leur alimentation, une priorité. La rencontre annuelle de la Communauté de pratique (CoP) sur les transferts sociaux monétaires en Afrique subsaharienne du 17 au 21 mars à Niamey au Niger. La CoP a pour objectif de contribuer à la mise en place de programmes de transferts monétaires efficaces au sein de systèmes intégrés de protection sociale en Afrique.

Parmi les instruments et textes internationaux qui font autorité en Afrique, il y a la convention n°102 et la recommandation 202 de l’OIT. Ce dernier inspire directement la logique du socle de la Protection Sociale. Quatre dimensions prioritaires y ont été définies : l’accès à la santé, l’enfance dans trois domaines clefs (alimentation, santé et éducation), le revenu pour les personnes en situation difficile et le troisième âge.

La recommandation n°202 est importante car elle souligne la nature progressive de la construction de la Protection Sociale. Elle institue particulièrement la double perspective d’une dimension verticale qui vise à assurer progressivement des niveaux de plus en plus élevés de protection et d’une dimension horizontale qui pose les garanties du socle de la Protection Sociale. La politique nationale en matière de Protection Sociale en RD Congo prend acte de ces événements et instruments et des progrès qu’ils promeuvent.

1.2. Contexte national

1.2.1. Le pays : situations et tendances

La Protection Sociale en RDC se construit dans un contexte et dans une conjoncture nécessaire à préciser en quelques points clefs :

La croissance démographique soutenue se maintient : d’ici les prochaines années, la population devrait continuer à s’accroître à un rythme élevé, de sorte qu’on s’attend à ce qu’elle atteigne la centaine de millions à l’horizon 2035-2040. On observe une dynamique démographique caractérisée par des déséquilibres dans la répartition de la population : 61,2% en milieu rural et 38,2% en milieu urbain ; la population est très jeune avec 50% des congolais qui sont âgés de 16 ans au moins, ce qui donne un rapport de dépendance économique très élevé, estimé à 0,95 soit près d’une personne inactive à prendre en charge par une personne active3. Des transformations profondes affectent le fonctionnement des communautés, notamment du fait de l’urbanisation et de l’accroissement rapide des concentrations de population urbaine. Les rapports de proximité mais aussi les liens de solidarité sont en voie de reconfiguration, ils s‘estompent pour faire place à des situations difficiles, parfois conflictuelles. On constate en particulier l’effritement croissant des mécanismes de redistribution sur lesquels reposaient les familles. Ainsi, par exemple, les aînés sont de moins en moins pris en charge par leurs descendants directs. En même temps, les familles elles-mêmes, tant leur structure que leur fonctionnement, se transforment radicalement. L’image de l’Etat dans l’esprit de beaucoup de Congolais est négative. Le plus souvent, l’Etat est absent de leur conscience. L’Etat, ses ressources et ses prérogatives sont régulièrement assimilées à des rentes qu’il faudrait s’accaparer pour soi et les siens. Les services publics deviennent alors une opportunité pour s’enrichir indûment avec pour conséquence des performances médiocres. Dans le sillage direct de cette dégradation, on observe l’érosion du sentiment national et l’effritement du respect de l’autorité publique. A terme, c’est l’unité du pays, la paix et sa stabilité qui sont en jeu. La vulnérabilité et à sa suite la pauvreté ne cesse de s’accroître. La majorité des Congolais vivent avec moins de un dollar américain par jour, montant considéré comme le seuil de pauvreté. Dans les villes comme dans les campagnes les situations d’indigence, temporaire ou chronique, se multiplient et s’intensifient. En dépit de progrès récent, une majorité des enfants n’ont pas accès à une éducation de qualité. Les infrastructures et l’encadrement scolaire sont largement déficients. Il en résulte que le taux de déperdition scolaire est élevé de sorte qu’une majorité d’enfants en âge scolaire ne fréquente aucun établissement scolaire. Par ailleurs, l’alimentation de qualité des enfants en bas âge (de 0 à 5 ans) reste problématique dans l’ensemble du pays, y compris dans les grandes villes. L’accès à la santé de la plupart des Congolais est médiocre. Non seulement le coût des prestations dépasse régulièrement leurs capacités financières, mais en outre la qualité des services offerts est médiocre. En effet, la deuxième enquête démographique et de santé (EDSRDC II. 2013-2014) présente 3,1% de couverture en assurance maladie fournie par l’employeur avec de variation de 6,2 dans le milieu urbain et de 0,4 dans le milieu rural. Concernant les mutuelles communautaires, l’enquête a présenté un taux de couverture de 1,4% avec une variation de 1,9% dans le milieu urbain et 0,9% dans le milieu rural. En rapport avec l’accès aux soins de maternité, la même enquête note une proportion de 24% en milieu rural et de 6% dans le milieu urbain de femmes qui ont accouché à domicile. Par ailleurs, la répartition des infrastructures et des compétences médicales dans l’espace national est source de grands déséquilibres. Sur le plan politique, la paix est revenue dans l’espace nationale même si les situations restent tendues à l’Est. Le processus de décentralisation est en bonne voie : 26 provinces devraient réellement voir le jour sous peu. Des progrès sont observés dans le champ de la démocratie. Toutefois, de manière générale, la gouvernance des institutions publiques appellent des progrès. Sur le plan économique, des progrès sensibles sont enregistrés régulièrement depuis une décennie. Tant les infrastructures que les initiatives économiques se sont sensiblement multipliées et bonifiées. Toutefois, le défi du partage des retombées de la croissance et de la redistribution équitable des richesses produites restent un souci majeur.

1.2.2. La Protection Sociale en RD Congo : vue d’ensemble

La Protection Sociale en RDC n’est pas une préoccupation récente. Bien avant l’indépendance, toute une série d’initiatives et de dispositifs avaient été mis en œuvre par le colonisateur. Dès son accession à l’indépendance, la RDC est devenue membre de l’OIT et a eu à ratifier 37 conventions (Conventions fondamentales: 8 sur 8, Convention de gouvernance: 2 sur 4, Conventions techniques: 27 sur 177).

Vers les années 1970, on a constaté un déclin progressif des acquis de la protection sociale. En même temps que les instruments de sécurité sociale perdaient progressivement de leur fonctionnalité, en même temps que l’assistance sociale aux pauvres disparaissait faute d’un budget conséquent, l’économie s’est essentiellement informalisée telle que le montre l’enquête 1-2-3 réalisée en 2012. En effet, du point de vue secteur institutionnel, c’est l’ensemble de secteur informel (agricole et non agricole) qui occupe la première place: 88,6% des actifs occupés y sont employés au niveau national, variant de 62,7 % à Kinshasa à 94,8 % en milieu rural4. Toute la population œuvrant dans l’économie informelle, se retrouve sans aucun dispositif pour les protéger contre les risques, sans accès aux dispositifs ou mesure de Protection Sociale.

Il est possible de souligner en quelques traits la situation contemporaine en matière de Protection Sociale en RDC :

Le pays ne dispose pas aujourd’hui d’une politique nationale susceptible de coaliser tous les efforts entrepris dans le domaine de la Protection Sociale. La RDC a pourtant signé un certain nombre d’engagements internationaux mais sans réellement leur donner une suite. C’est notamment l’engagement pris par tous les Etats membres de l’OIT dont la RDC, d’accorder priorité absolue aux politiques et aux initiatives tendant à étendre la sécurité sociale à ceux qui ne sont pas couverts, à l’occasion de la 89ème Conférence Internationale du Travail, en juin 2001. De manière générale, le secteur de la Protection sociale est caractérisée par : (i) l’insuffisance dans la couverture et dans la qualité des prestations sociales, (ii) la faible prise en charge des indigents et vulnérables, (iii) l’insuffisance du financement et des actions non pérennes. Par ailleurs, le déficit de coordination entraine une certaine balkanisation : un nombre important d’acteurs mènent indépendamment les uns des autres des actions disparates, d’envergure variable, qui, parfois, se font concurrence les unes aux autres. Il en résulte d’importants gaspillages et l’impression dominante d’une grande inefficacité et d’une pauvre durabilité. Il y a cependant lieu de remarquer que depuis 2013 des progrès sont enregistrés en matière de coordination interministérielle, notamment sous l’impulsion de l’actuel Premier Ministre. Les besoins en matière de Protection Sociale sont grandissants, non seulement parce que le pays a traversé plusieurs épisodes de grande instabilité et parfois de guerre, mais aussi plus fondamentalement parce que, en dépit d’indiscutables progrès en matière d’infrastructures économiques et sociales, la pauvreté reste prédominante. En effet, le rapport préliminaire de l’étude SITAN 2014 vient de montrer que la croissance économique observée en RDC à partir des données sur le PIB s’est traduite par une croissance des revenus et de consommation pour 90% de ménages de la RDC.Toutefois, ce rapport attire l’attention sur les 10% de ménages les plus pauvres pour lesquels le revenu a diminué5. Les mutuelles de santé ont été initiées pour améliorer l’accès financier des populations aux soins de santé. Le nombre de mutuelles a augmenté significativement depuis une dizaine d’années. Cependant, les mutuelles démontrent encore aujourd’hui de faibles taux d’adhésion et de pénétration dans leurs zones de couverture respectives. D’autres insuffisances sont régulièrement observées au niveau des mutuelles de santé :
le niveau de la cotisation qui limite la portée du paquet de services assuré ; les difficultés rencontrées dans le recouvrement des cotisations ; la capacité d’autofinancement des mutuelles les défaillances au niveau de l’offre et de la qualité des services; la dimension des mutuelles qui sont encore insuffisamment fédérées, limitant le partage des risques et la réalisation d’économies d’échelle. Toutefois, l’approche des mutuelles de santé peut contribuer directement à la progression vers la couverture sanitaire universelle et peut être considérée comme un levier car, malgré les difficultés mentionnées, le développement des mutuelles aujourd’hui en RDC montre les atouts suivants : (i) les faibles niveaux de cotisation permettent d’avoir des adhésions massives comme à Bwamanda et au Sud-Kivu (plus de 100.000 bénéficiaires), (ii) la persistance du mouvement avec de bons taux de fidélisation sur une longue période malgré que le remboursement des soins ne soit toujours pas subventionné, (iii) le fort intérêt actuel de la population et sa forte réactivité quand elle est engagée, (iv) la professionnalisation progressive de la gestion des mutuelles et leur meilleure capacité à négocier des tarifs préférentiels, (v) l’implication des pouvoirs publics qui a un effet levier sur le développement des mutuelles de santé.

Tous ces éléments, l’un dans l’autre, consolident les bases sur lesquelles la Protection Sociale en RDC peut s’enraciner.

II. Grands défis

Mettre effectivement et rapidement en œuvre la Protection Sociale dans un pays aussi vaste et complexe que la République Démocratique du Congo soulève immédiatement de grands défis qui délimitent l’horizon vers lequel tous les efforts doivent tendre. Deux catégories de défis d’égale importance doivent être soulignés : (i) d’une part des défis de première ligne, directement liés à l’action et aux résultats et (ii) d’autre part des défis structurants qui transforment le fonctionnement de la société.

3.1. Défis de première ligne

La poursuite des finalités de Protection Sociale convoque cinq défis de première ligne directement liés à des résultats.

(1) L’amélioration du niveau de vie des ménages les plus pauvres. Mis à part leurs effets positifs sur le niveau de consommation, notamment alimentaire (avec des impacts potentiellement significatifs sur la nutrition), une Protection Sociale efficace permet aux ménages les plus pauvres de renforcer leurs investissements productifs et leurs investissements dans les enfants.

(2) La réduction de la malnutrition. Les niveaux élevés de la malnutrition chez les enfants de moins de cinq ans (parmi les plus élevés en Afrique) exigent le renforcement des programmes nutritionnels, ainsi que la mise en œuvre de transferts sociaux, qui, par leur impact sur le niveau et la diversité de la consommation alimentaire, devraient jouer un rôle préventif important.

(3) L’amélioration de l’accès aux services sociaux de base par les populations les plus vulnérables, les laissés pour compte ou les exclus. En réalité, le défi consiste à intégrer ces personnes plus vulnérables dans le processus de développement et dans l’économie.

(4) La consolidation financière et économique des régimes de Protection Sociale et de sécurité sociale. Sur le plan financier, il est crucial d’assurer la viabilité actuarielle des régimes de Protection Sociale et de sécurité sociale, ce qui en pratique signifie qu’il faut la pérennité des instruments financiers qu’elles mobilisent. Sur le plan économique, il est essentiel de travailler au développement durable de l’activité productive et créative qui se déploie en halo autour ou dans le sillage direct des efforts de Protection Sociale.

(5) Le renforcement du cadre législatif et règlementaire, des capacités institutionnelles et du financement de la Protection Sociale. Le développement de la Protection Sociale est une opportunité de renforcement. Ce défi recouvre diverses facettes : (i) combler les manques ou « trous » qui subsistent dans la réglementation, de manière à assurer une protection sociale adéquate et de qualité pour toutes les catégories sociales, notamment les plus vulnérables, (ii) construire des mécanismes efficaces de coordination intersectorielle, (iii) renforcer les capacités institutionnelles, (iv) mettre en place de forts systèmes de suivi, d’évaluation, de contrôle et de sanction.

3.2. Défis structurants

Les défis structurants désignent cette catégorie d’effets qui, lorsqu’on les gagne, ont la vertu de déclencher de larges transformations sociétales. Les consultations nationales et provinciales ont mis en lumière huit défis majeurs de type structurant. Tous les acteurs de la Protection Sociale les rencontreront sur leur route et ils auront à cœur de les affronter.

(1) Défi de l'engagement : c’est le défi le plus important, le plus ambitieux aussi, celui de mettre effectivement en application – dès à présent – la Politique Nationale de Protection Sociale pour qu’elle n’allonge pas la liste des grandes intentions restées lettre morte. Le succès de la Protection Sociale repose avant tout sur la volonté de toutes les familles d'acteurs en République Démocratique du Congo, la population, son Gouvernement, ses assemblées (Parlement et Sénat). Elle exige l'engagement continu de tous les acteurs, particulièrement l'Etat et de tous ses agents. (2) Défi du financement durable 100% congolais : la Protection Sociale en RDC doit reposer sur les richesses produites au Congo par des Congolais pour des Congolais. Le financement de la Protection Sociale doit être national (100% congolais) et peu sensible aux conjonctures (soutenabilité financière). Ce défi exige de s'attaquer aux mécanismes qui génèrent la faible disponibilité des ressources financières. Il exige aussi de s'attaquer aux racines de la pauvreté extrême en ville et dans les zones rurales pour libérer les forces productives de la Nation. Il demande de mobiliser toutes les ressources congolaises et de les utiliser de la meilleure manière. (3) Défi du partage des revenus : le financement durable de la Protection Sociale implique l’accès à un revenu décent pour tous les Congolais, en particulier les jeunes sans emploi, les ménages avec enfants et les aînés à la retraite. Ce défi repose sur deux enjeux économiques majeurs : (i) créer de la richesse en même temps que les activités susceptibles de générer cette richesse et (ii) redistribuer équitablement la richesse à l'échelle du pays et parmi toutes les catégories sociales. (4) Défi de la fonctionnalité du cadre juridique : créer, rendre applicable, faire appliquer mais également faire évoluer un cadre juridique adéquat nécessaire pour fonder la Protection Sociale. L'enjeu est double : (i) produire et rendre disponibles les textes ou instruments réglementaires et normatifs, (ii) faire respecter – et donc faire appliquer – les normes et règles relativement à la protection sociale, en contrôlant et sanctionnant. (5) Défi de la coordination : coordonner les diverses initiatives, activités, instruments, dispositifs,… qui existent dans le domaine de la Protection Sociale. La Politique Nationale doit mettre fin aux contradictions, aux tensions, aux rivalités ou aux conflits qui surgissent entre les multiples acteurs de la Protection Sociale. Ce défi exige de mettre fin aux chevauchements de prérogatives entre les structures concernées, de rechercher des synergies, de développer des partenariats entre les divers partenaires actifs dans le secteur de la Protection Sociale de façon à ce que chaque intervenant puisse donner le meilleur de ce qu'il peut faire là où il est le plus comptent et le plus légitime. (6) Défi de « l'intelligence des situations » : connaître, reconnaître mais aussi comprendre la diversité des terrains et des problématiques, la diversité des situations et des possibilités,… Comprendre l'origine de cette diversité, ses effets, les dynamiques qu’elle génère. En pratique, ce défi invite à établir l'inventaire, à dresser le bilan mais aussi à évaluer l'existant, c'est-à-dire les lois, les acteurs, les pratiques, les initiatives, les problématiques… dans toute leur singularité sur toute l'étendue du territoire congolais. Il invite aussi à s'informer sur ce qui se fait à l'internationale, à découvrir ce qui est expérimenté chez les autres, avec succès ou dans l'échec . Il doit s'agir d'une connaissance "intelligente", c'est-à-dire une connaissance qui met l'accent sur l'intelligibilité (comprendre le pourquoi et le comment) et sur l'esprit critique. (7) Défi de la compétence : la qualité des prestations et de la gestion en matière de Protection Sociale dépend de la compétence de femmes et des hommes chargés de la mettre en application. L’enjeu est de mettre à niveau l'ensemble des intervenants, prestataires, managers ou gestionnaires, pour qu'ils aient des compétences à la hauteur des enjeux, ce qui suppose de les former et de développer leur "savoir entreprendre" autant que leurs savoirs et savoir faire en matière de Protection Sociale. (8) Défi de l'information à la portée de tous et de chacun : mettre à la disposition de tous les concernés, quels qu'ils soient, où qu'ils soient, une information de qualité expliquant clairement ce qu'est la Protection Sociale dans le pays, à quels droits et à quels devoirs elle correspond, comment elle fonctionne, en particulier comment elle est dirigée et financée, comment avoir accès à ses services, où, à quelles conditions, qui sont ses bénéficiaires...

Toutes les mesures, dispositions, activités et initiatives entreprises sous le couvert de la Protection Sociale doivent contribuer à relever ces défis et rendre la Nation congolaise gagnante.

III. Principes fondamentaux

A. La construction d’un mouvement mutualiste sérieux et fort

Une politique forte s’appuie sur des principes forts, clairement explicités, destinés à orienter toutes les mesures, dispositions et actions prises en son nom.

La politique de Protection Sociale en RDC repose sur un certain nombre de principes fondamentaux. Ils ont été identifiés lors des consultations provinciales ou nationales. Ils ont été largement discutés lors de l’état des lieux et des réflexions élaborés participativement tout au long du processus qui a conduit à la production du présent draft du document de politique nationale.

Les principes incarnent l’esprit dans lequel la Protection Sociale doit être élaborée et menée dans tout le pays.

De manière conventionnelle, un certain nombre de pratiques et priorités sont traduits en termes de principes directeurs et se retrouvent régulièrement promus en matière de Protection Sociale au niveau mondial : (i) le respect des droits humains universels, (ii) la solidarité nationale, (iii) l’assistance aux personnes et ménages en situation de vulnérabilité, (iv) la réduction des inégalités et la promotion de l’égalité, notamment la promotion de l’équité et l’égalité de genre (v) l’inclusion sociale et la construction d’une société juste, (vi) la priorisation selon l’importance et la fréquence des risques, (vii) le renforcement des capacités des ménages et des individus les plus vulnérables, (viii) une conception large de la protection sociale qui combine des actions de prévention, de protection et de promotion, (ix) l’importance des structures communautaires. Ces dernières, de même que les structures familiales, nucléaires ou élargies, jouent en effet un rôle clef dans la prévention des risques sociaux, la médiation et la résolution des problèmes. Elles constituent souvent le lieu privilégié pour mener des actions de sensibilisation et de prévention de certains risques sociaux.

En RDC, la mise en œuvre de la Politique nationale de protection sociale repose sur les principes directeurs suivants.

4.1. Principe d'universalité

La Protection Sociale embrasse toutes les couches de la population congolaise, le secteur informel comme le secteur formel, les ruraux autant que les urbains, les femmes au même titre que les hommes, les jeunes autant que les aînés, les chômeurs de même que les travailleurs, les migrants autant que les sédentaires, les travailleurs du secteur public (notamment les agents de l'Etat) avec autant de soin que ceux du secteur privé... avec une attention particulière pour les vulnérables, les plus démunis et les indigents. La Protection Sociale ne fait pas de différence entre les Congolais, quels qu’ils soient, d’où qu’ils viennent. Elle incarne le principe de la plus large inclusion sociale.

En pratique, l’universalité convoque un principe d’homogénéité des prestations : la même qualité des prestations doit être dispensée quelle que soit la catégorie sociale et quels que soient les revenus des bénéficiaires, quel que soit le lieu ou quelle que soit la période ou la circonstance.

4.2. Principe d’équité

La politique de Protection Sociale repose en partie sur la devise « de chacun selon ce qu’il peut, à chacun selon ses besoins », ce qui signifie que ceux qui possèdent ou qui ne sont pas dans le besoin, contribuent pour ceux qui n’ont pas ou qui sont dans la nécessité. L’équité correspond à un sentiment de justice fondée sur la reconnaissance des droits de chacun. L’équité exige que les droits des personnes, en particulier les groupes faibles ou vulnérables, soient garantis. En pratique, l’équité prend en compte les différences de genre, les inégalités sociales, régionales et locales en veillant à ce que les mécanismes mis en place pour accompagner les groupes les plus faibles ne perpétuent pas, ni n’engendrent la stigmatisation et l’exclusion.

La généralisation de l’équité sous-tend la volonté d’inclure le plus largement possible. Elle implique nécessité que l’ensemble des catégories de la population puisse avoir accès aux mêmes prestations de qualité dans les différents domaines de la Protection Sociale, que ce soit les travailleurs du secteur formel ou du secteur informel, des femmes et des hommes, des jeunes, des adultes ou des aînés.

La promotion de ce principe dans la mise en œuvre offre l’occasion de le normaliser plus largement dans la vie quotidienne congolaise.

4.3. Principe de mutualisation

La conception et la mise en œuvre de la Protection Sociale en République Démocratique du Congo privilégient les mécanismes de péréquation et de mutualisation. En pratique, cela signifie que le principe de solidarité est posé d'emblée à la fois comme fondement et comme mode opératoire de la Protection Sociale. C’est pourquoi elle intègre des dynamiques contributives (notamment la sécurité sociale s’adressant aux catégories disposant de revenus) et des dynamiques non contributives (parmi lesquelles les aides sociales s’adressant aux plus vulnérables et aux indigents). En d’autres termes, les personnes se soutiennent les unes les autres.

4.4. Principes de progressivité et de réalisme

La mise en œuvre de la Protection Sociale doit aller étape par étape mais solidement en garantissant la qualité et la diversité. Il s’agit en substance de couvrir progressivement, pas à pas, un ensemble de risques et de besoins, que ce soit en matière de couverture des risques sanitaires, sociaux, économiques, professionnels, de protection des retraités ou des indigents… Conformément à l’esprit de la recommandation n°202 de l’OIT, il s’agit de commencer avec une gamme la plus étendue possible et, par la suite, d’approfondir au fur et à mesure des possibilités.

Le réalisme découle immédiatement de la mise en œuvre de la progressivité : on avance pas à pas pour aller aussi loin qu’on le peut mais en gardant les pieds sur terre.

Le principe de progressivité convoque le principe d’évolutivité : la politique doit être dynamique et s’adapter aux évolutions dans les contextes, dans les approches mais aussi dans les mentalités.

4.5. Principe d’alignement international et national.

La politique doit être en conformité avec les grands standards internationaux, notamment le respect des droits de l’Homme tout en tenant compte étroitement des besoins des populations.

En vertu du principe d’alignement national, la politique qui a été produite de manière participative, doit servir de référence contraignante pour toutes les actions et initiatives prises en RDC.

4.6. Principes de coordination et de cohérence fonctionnelle

La politique repose sur la synergie entre tous les acteurs, tant sur les plans stratégique qu’opérationnel, elle promeut une intersectorialité efficace, efficiente, dynamique et imaginative. Le principe de cohérence fonctionnelle découle directement du principe de coordination: ce qui vient après prend en compte, intègre ce qui précède ou ce qui existe déjà (la main droite intègre ce que la main gauche fait par ailleurs).

4.7. Principe de redevabilité

Tous les acteurs impliqués dans la conception, la conduite et la mise en œuvre des mesures ou programmes de la Protection Sociale sont appellés à rendre des comptes aux bénéficiaires (redevabilité descendante) et aux autorités de tutelle (redevabilité remontante).

Les compte rendu doivent comporter toute l’information, non seulement sur les prestations, leurs modalités et leurs performances, mais aussi sur l’usage des ressources et des moyens, les financements notamment ainsi que sur les recrutements.

Les Congolais doivent savoir ce que coûte leur Protection Sociale et d’où viennent les ressources qui la financent. Ils doivent aussi connaitre sur quelles bases ceux et celles qui la mettent en œuvre ont été mobilisés et de quelles responsabilités ils ont été chargés. C’est pourquoi, deux autres principes découlent directement de la redevabilité :

Principe de la responsabilité assumée : ceux qui opèrent sont entièrement responsables des conséquences des opérations qu’ils mènent ou dirigent ; Principe de séparation des fonctions : les quatre fonctions de base (financement, prestation de services, régulation et contrôle de la qualité) ne peuvent pas être assumée par la même structure, ni a fortiori par les mêmes acteurs.

4.8. Principe d’expérimentation et d’innovation

La politique de Protection Sociale doit soutenir la recherche, l’invention et la mise à l’essai de nouvelles solutions endogènes, locales ou nationales. Elle doit valoriser la quête permanente des solutions les plus efficaces, les plus efficientes, les plus aptes à incarner les valeurs et principes qui donnent force à la Protection Sociale.

Un principe de réflexivité découle directement : la politique progresse en s’appuyant sur le suivi évaluation et la capitalisation des expériences, mesures, programmes, dispositifs, instruments et pratiques dans le but de tirer des leçons, d’apprendre, de mieux décider et d’innover.

4.9. Principe d’anticipation

Les évolutions, les tendances et les effets ou conséquences des mesures prises dans le cadre de la protection sociale, que ce soit en matière d’opération, de financement, de régulation, sont prises en compte à l’avance dans les dispositifs. Les acteurs et gestionnaires doivent anticiper tout ce qui peut se passer dans le cadre du développement de la Protection Sociale.

IV. Conditions générales de faisabilité durable

Les principes avancés à la section précédente sont prolongés par des conditions de faisabilité durable des prestations, c’est-à-dire les modalités concrètes de délivrance dont la prise en compte conditionne directement la faisabilité de la Protection Sociale et la durabilité opérationnelle des prestations menées sous son couvert.

Les conditions à réunir sont notamment celles-ci qui devraient préoccuper tous les acteurs de la Protection Sociale en RDC :

La prévisibilité des prestations : leur cadre organisationnel doit garantir leur régularité et la stabilité de leurs caractéristiques, en particulier leur qualité, les modalités, conditions et lieux de délivrance. Leur adéquation des prestations à une demande sociale pertinente : elles doivent répondre à un besoin vécu et exprimé par les bénéficiaires. Elles doivent correspondre à une demande pressante concernant un grand nombre de personnes. Les prestations se délivrent dans un cadre formel, réglementaire et légal, en conformité avec une législation nationale qui précisent les modalités de leur délivrance, leurs normes de qualité ainsi que leurs normes de performance. La qualité des prestations doit être opposable : il doit être possible de se plaindre de leur insuffisante qualité ou de leur absence là où on les attend. Il doit être possible de les dénoncer dans le cadre d’un système de plaintes organisé spécifiquement et réputé effectif (ce qui veut dire que les plaintes déposées sont de fait suivies de mesures ou d’effets correcteurs). Les bénéficiaires savent comment se plaindre (quelles procédures, conditions, modalités). Ils savent aussi auprès de qui ou de quelle instance ils peuvent se plaindre le cas échéant. Cohérence entre les politiques sociales, économiques et de Protection Sociale, notamment la cohérence avec les politiques de l’emploi. Les prestations ne font pas double emploi avec des prestations déjà existantes par ailleurs. Efficience des prestations de qualité : les coûts des prestations sont en rapport avec la possibilité de les financer durablement. Le souci de l’équilibre budgétaire doit inspirer la délivrance des prestations, ce qui ne signifie cependant pas qu’il faille faire de la rentabilité financière une modalité absolue, ni a fortiori une finalité. La fonctionnalité budgétaire invite à faire le mieux et le plus pour le plus grand nombre avec le budget qu’on est capable de mobiliser effectivement. Le suivi-évaluation des prestations tant quantitatif (nombre, fréquence) que qualitatif (qualité) doit délivrer toute l’information nécessaire pour enregistrer leurs résultats, effets et impacts, attendus ou inattendus, en même temps que leurs performances et les raisons de ces performances. L’articulation synergique des prestations et la concertation fonctionnelle des prestataires. Il doit en résulter que chaque prestataire fasse principalement ce qu’il est réputé faire le mieux, ce pour quoi il est particulièrement compétent et le mieux équipé, tout en tenant compte de ce que les autres font et qui peut influencer l’exercice ou la délivrance de ses prestations. Conditionnalité : dans la mesure du possible, lorsque c’est opportun, envisager de conditionner la délivrance de la prestation à des conditions qui en garantissent l’équité, la qualité, l’efficacité et l’impact durable. Publicité : toute l’information opérationnelle (qui, quoi, quand, comment, pourquoi, dans quel but, où, combien, à quelles conditions,…) doit être délivrée avant ou au plus tard en même temps que la prestation elle-même est délivrée. La bonne compréhension de la mesure ou de la prestation par le bénéficiaire conditionne les performances. L’appropriation insiste pour que l’ensemble des acteurs fassent de la Protection Sociale leur création et en même qu’elle fonde en eux un sentiment de responsabilité. L’appropriation suppose la connaissance mais aussi la maîtrise tant politique que technique. Plus la mesure ou la prestation rentre dans la vie de ceux à qui elle est destinée, plus elle sera durablement efficace.

V. Finalités, objectifs et effets de la Politique Nationale de Protection Sociale

A. des missions d’accompagnement sur le terrain Sud

La Politique Nationale de Protection Sociale poursuit un certain nombre de finalités et d’objectifs en même temps qu’elle est appelée à engendrer des effets à divers niveaux, individus, ménages, communautés, collectivités, Nation… dans plusieurs domaines, principalement sociaux, culturels et économiques. Ces finalités, objectifs et effets correspondent à autant de défis mobilisants.

7.1. Trois finalités, trois vocations fondamentales

Tous les efforts investis dans la construction d’une Protection Sociale durablement efficace en même temps que durablement efficiente donnent substance – et puissance – à trois finalités intimement nouées entre elles :

Consolider un Etat qui démontre quotidiennement à travers ses dispositifs fonctionnels de Protection Sociale qu’il se préoccupe de tous et de toutes, un Etat dans lequel chaque citoyen et chaque citoyenne se reconnaît, un Etat qui unifie la Nation et qui crée les conditions d’une paix durable et d’un bien-être généralisé ; Inscrire dans la société congolaise des mécanismes de redistribution équitable de la richesse, notamment en allouant à chacun et chacune les moyens de mener une vie digne, enrichissante, contributive et utile à la collectivité ; Transformer les mentalités, comportements et pratiques au sein de la société congolaise dans le sens du développement (i) du souci de l’autre, (ii) de la solidarité, (iii) de la responsabilité et (iv) du bien commun.

La Protection sociale en RDC n’a donc pas seulement vocation à prendre soin des laissés pour compte de la croissance économique ou des personnes temporairement en difficulté, mais elle vise aussi, de manière raisonnée et volontaire, des transformations majeures dans le fonctionnement de la société, à hauteur des individus, des ménages et des communautés. La Protection Sociale devient alors un moteur pour tirer l’histoire nationale vers le haut.

7.2. Objectifs

Un objectif général peut être décliné de ce qui précède : garantir à toutes les couches de la population une couverture de Protection Sociale efficace d’ici 2025, d’une part en réduisant la vulnérabilité des populations face aux risques économiques et sociaux et, d’autre part, en même temps, en transformant le fonctionnement de la société congolaise qui produit ou entretient ces risques.

De cet objectif général, il s’impose qu’en matière de Protection Sociale, les efforts ne doivent pas seulement porter sur les phénomènes (vulnérabilité, pauvreté, exclusion, indigence, détresse,…) mais également sur les causes et les mécanismes qui les génèrent et qui les rendent si résilients1.

Cet objectif général est étayé par des objectifs à court, moyen et long terme. Mais avant de décliner ces objectifs plus spécifiques, il importe de situer l’esquisse stratégique d’ensemble dans laquelle ils prennent place.

7.2.1. Deux lignes stratégiques complémentaires

Quel que soit le domaine, deux lignes d’action générales s’imposent en matière de Protection Sociale :

Rendre opérationnel, efficace et efficient ce qui existe déjà, c’est-à-dire les actions, les mesures, les instruments, les dispositifs, y compris la communication qui sont reconnus pertinents mais qui actuellement, pour des raisons diverses, ne rendent pas les services attendus (faibles performances) ; Introduire progressivement des innovations (i) en matière de mesures, de prestations ou d’interventions, (ii) en matière de textes (nouveaux droits, nouvelles normes), (iii) en matière d’instruments (nouveaux cadres institutionnels ou fonctionnels) et (iv) dans le domaine du financement (les ressources, leur gestion et leur allocation).

7.2.2. Objectifs à court et moyen terme

Mettre en œuvre un dispositif, des modalités et des instruments pour une gouvernance efficace et clairvoyante de la protection sociale. Garantir les conditions de faisabilité des prestations et services de qualité en matière de protection sociale. Renforcer la fonctionnalité et l’accessibilité des services d’actions sociales existants, notamment l’éducation, la santé, le troisième âge. Assurer le financement durable des mesures, dispositifs, prestations et structures de protection sociale, et garantir sa gestion rationnelle et transparente. En particulier, garantir dans la durée le financement 100% congolais de la Protection Sociale Développer les dispositifs de recherche et de capitalisation des expériences en soutien à la décision et en appui de l'innovation dans le secteur de la protection sociale Mettre en place un cadre juridique, réglementaire, normatif et institutionnel favorable au développement de la Protection Sociale et à la coordination entre tous les acteurs. Mettre en œuvre un système d’information complet et « grand public » sur la Protection Sociale, sa raison d’être, son fonctionnement, sa gouvernance et les modalités de son financement. Renforcer les capacités humaines, techniques et communicationnelles pour faire fonctionner efficacement la Protection Sociale.

7.2.3. Objectifs à long terme

Soutenir la transition du secteur informel vers le secteur formel2. Réduire significativement la vulnérabilité dans les groupes les plus exposés aux risques de basculer dans la misère ou l’indigence. Instaurer et mettre en application des formes de gouvernance dépolitisée de la Protection Sociale, une gouvernance qui implique et responsabilise toutes les familles d’acteurs parties prenantes. Renforcer les performances et la fonctionnalité des régimes contributifs existants (en particulier, améliorer leur gestion, leur gouvernance, leurs capacités financières et les équilibres financiers sur lesquels ils reposent).

7.3. Effets attendus

Une politique, quelle qu’elle soit, visent des effets, tant directs qu’indirects. Parmi ces effets, on distingue au moins deux familles : (i) les effets connus et explicitement recherchés, formulés à l’avance, ce sont donc des effets explicitement attendus, et (ii) les effets inattendus, qui viennent en plus, qui ne sont pas explicités, qui sont constatés après coup et qui, souvent, ne sont pas prévisibles.

Les effets attendus sont ceux qui mobilisent mais aussi orientent les efforts des acteurs de la Protection Sociale. Les effets attendus sont aussi ceux qui font l’objet d’un suivi évaluation qui les mesurent tant quantitativement que qualitativement.

7.3.1. Effets attendus directs

Redistribution plus équitable des revenus et de la richesse nationale, particulièrement en faveur des plus vulnérables et des plus démunis. Prévention des risques sociaux ou économiques par la réduction de leur occurrence et de leur portée. Traitement ou atténuation des conséquences de la réalisation des risques. Prévention partielle de l’accroissement de la pauvreté en cas de crise économique ou de conjoncture défavorable. Maintien pour les ménages et les individus d’un accès à l’alimentation et aux autres services sociaux de base qui fondent le bien-être et la dignité. Fonctionnalité de mécanismes de péréquation de sorte que ce qui ne peut pas se faire à l’échelle d’une province se réalise à l’échelle nationale, ou vice versa. Consolidation du dispositif légal de Protection Sociale et de sa fonctionnalité (renforcement de l’application des textes législatifs et réglementaires).

7.3.2. Effets attendus indirects

Les effets indirects que toute politique déclenche dans son sillage sont souvent déterminants pour sa valeur. Ils conditionnent d’une manière profonde l’engagement et la coopération des diverses familles d’acteurs.

7.3.2.1. Effets transversaux

Le principal effet indirect, celui qui doit profondément imprégner tous les efforts engagés sous couvert du développement de la Protection Sociale, correspond à la transformation de mentalités et de pratiques sociales. A travers sa mise en œuvre concrète, la Protection Sociale doit en effet contribuer à transformer des attitudes et des comportements, à commencer par la conception que les Congolais se font de l’Etat, de son rôle et de sa place dans la vie en RDC.

Le développement de la Protection Sociale doit en outre contribuer à construire une culture de la solidarité3. La Protection Sociale doit contribuer à disséminer des comportements conviviaux, à généraliser le souci de l’autre. Elle doit aider à changer les relations vis-à-vis des personnes vulnérables, indigentes ou vivant avec un handicap physique ou mental.

Ainsi que les consultations préparatoires l’ont démontré, le chantier qu’inaugure la construction de la Protection Sociale par les Congolais pour tous les Congolais est une école d’apprentissage de la démocratie au quotidien, notamment par l’exigence d’information, de responsabilité, de redevabilité, de concertation loyale et de débats constructifs que son développement durable exige et continuera à exiger.

7.3.2.1. Effets indirects sur l’Etat et son fonctionnement

Modernisation du fonctionnement de l’Etat, notamment par le biais de l’enrichissement et de l’élargissement de la gamme d’outils et de technologies propres à faciliter la délivrance des services au public, notamment les prestations de Protection Sociale ; Renforcement de la légitimité de l’Etat et du sentiment de présence de l’Etat dans la vie quotidienne et active des citoyens congolais ; Renforcement de l’engagement des agents de l’Etat pour proposer des services de qualité et effectivement accessibles pour tous les citoyens. Revalorisation des métiers liés à la fonction publique (amélioration de leur image de marque et de leur attractivité). Renforcement des échanges inter ministériels, développement de la coordination, de la coopération entre les programmes ministériels, intersectionnalité davantage fonctionnelle.

7.3.2.2. Effets indirects sur la citoyenneté et sur la vie sociale

Développement d’un sentiment de citoyenneté et d’appartenance à une communauté de destin envers la quelle on se sent reconnaissant et redevable (la Nation congolaise). Développement de la fierté d’être Congolais ; Création d’un sentiment de dignité et développement de l’estime de soi chez les personnes soutenues ; Généralisation d’une perception positive en matière d’indigence et de vulnérabilité, notamment à l’égard des personnes du troisième âge, des personnes en situation d’indigence ou celles qui vivent avec un handicap ou une maladie invalidante.

7.3.2.3. Effets indirects sur l’économie

Les politiques de Protection Sociale exercent un effet important sur l’économie, à deux niveaux au moins : (1) d’une part l’effet redistributeur des richesses nationales, dont on connaît l’effet favorable sur la répartition des revenus et, en aval, l’effet d’encouragement de l’activité et de l’initiative économique, (2) d’autre part, l’action entravante ou inhibitrice des mécanismes générateurs de la pauvreté. La Protection Sociale, lorsqu’elle est efficace, entrave les processus ou dynamiques qui répandent la pauvreté.

D’autres effets indirects de nature économique sont à placer en ligne de mire des efforts investis dans la Protection Sociale :

Accroissement des investissements productifs ou des activités génératrices de revenus du fait d’une meilleure disponibilité financière et de meilleures conditions de vie (sécurité, revenus, confort existentiel) ; Sécurisation des patrimoines des ménages les plus vulnérables, notamment la réduction du recours à l’usure et autres opérations mafieuses réputées aggraver la pauvreté ; De manière globale, soutien à la croissance économique. Toutes les mesures, actions ou dispositifs qui préviennent les risques sociaux ou économiques contribuent, directement ou indirectement, à soutenir la croissance. Ils y parviennent, notamment, en soulageant les opérateurs économiques des risques susceptibles d’entraver ou d’inhiber leurs initiatives et entreprises économiques. La Protection Sociale alimente un cercle vertueux créateur de richesses : parce que les agents économiques sont efficacement protégés, ils sont plus performants4 ; Accroissement du nombre d’entreprises, activités et initiatives qui, reconnaissant le bien-fondé et l’efficacité de la Protection Sociale, passent du secteur informel au secteur formel. Retour dans le secteur formel de ceux qui l’avaient quitté. Retour au pays des talents ou des « cerveaux » qui avaient choisi de s’expatrier pour exercer leurs compétences dans un environnement économique et institutionnel mieux sécurisé. En même temps, le développement d’une Protection Sociale efficace et de qualité peut sensiblement atténuer le désir de quitter le pays.

VI. Grandes orientations : Vue d’ensemble

8.1. Quatre dimensions, cinq piliers, cinq fonctions

La politique de la protection sociale repose sur quatre dimensions et cinq piliers tandis qu’elle mobilise quatre fonctions.

8.1.1. Quatre dimensions

Les quatre dimensions sont les suivantes :

L’accès aux soins de santé (à travers le principe de la couverture sanitaire universelle, la CSU) ; L’enfance (alimentation, santé et éducation des enfants) ; La sécurité de revenus pour les personnes en situation difficile, notamment les plus vulnérables et les indigents ; Le troisième âge, notamment les personnes du troisième âge qui sont indigentes.

C’est dans ces quatre domaines que la politique développe des prestations de qualité. Elles prennent leur source dans la recommandation n°202 de l’OIT qui précise en quoi consiste le socle de la Protection Sociale. Ces prestations sont soutenues par cinq piliers qui conditionnent leur opérationnalité.

8.1.2. Cinq piliers

Les cinq piliers sont les suivants :

La gouvernance de la Protection Sociale : toute politique a besoin d’être pilotée efficacement, de manière éclairée et structurante ; Le financement de la Protection Sociale : toute politique de Protection Sociale comporte des coûts. De sorte qu’elle nécessite des moyens financiers prévisibles, suffisants et durables pour être mise en œuvre dans les meilleures conditions ; Le renforcement des capacités humaines, techniques et opérationnelles : pour que la Protection Sociale soit effective, les prestataires doivent être compétents pour que les prestations soient délivrées de manière efficace et efficiente. La qualité des ressources humaines ne suffit pas, il faut aussi que les prestataires puissent s’appuyer (i) sur des technologies efficaces et parfaitement maîtrisées, (ii) sur un cadre réglementaire et normatif suffisant qui organise les prestations et précise les performances attendues ; La recherche, l’innovation et le suivi-évaluation en matière de Protection Sociale conditionnent son évolution au fil du temps, sa capacité à s’adapter continuellement aux évolutions mais aussi sa capacité à inventer de nouvelles solutions pour toujours mieux répondre aux besoins de populations et aux exigences des situations ; L’information aux bénéficiaires et l’éducation citoyenne car la Protection Sociale nécessite que les bénéficiaires connaissent et comprennent l’ensemble de ce qui est entrepris dans le but de les protéger. L’information doit, notamment, leur permettre de rechercher la prestation à laquelle ils ont droit, mais également de réagir en cas de dysfonctionnement. La bonne information et l’éducation des utilisateurs de la Protection Sociale contribuent à son amélioration continue mais également à sa bonne délivrance et à son contrôle. De l’information dépend à la fois la qualité des prestations et celle de l’engagement, tant citoyen qu’institutionnel.

La protection sociale est synthétisée par le schéma n°1. Les prestations dans les quatre dimensions reposent sur cinq piliers et les fondations solides qu’apportent les principes.

.2. Quatre dimensions : définition, objet, champ d’application

Ces quatre dimensions correspondent aux domaines qui constituent le socle pour la Protection Sociale et dans lesquels des prestations sont développées, conformément à la convention n°102 et à la recommandation n°202 de l’OIT.

A l’avenir, d’autres dimensions intégreront la politique de Protection Sociale de manière à élargir les dimensions du socle (conformément à l’approche horizontale proposée la recommandation n°202) tandis qu’au sein de chaque dimension, il sera offert une gamme de plus en plus large de prestations (conformément à l’approche verticale proposée par la recommandation n°202).

Avant d’entrer dans le détail (sections 11 et 12), il importe cependant d’en préciser le contenu en quelques mots.

8.2.1. Dimension « Accès aux soins de Santé »

Le domaine de la santé est très vaste. Les risques sanitaires sont nombreux et très divers, variables d’un lieu à un autre, d’une période à une autre. La Protection Sociale n’englobe pas tous les domaines de la santé. Elle s’intéresse prioritairement, du moins actuellement en RDC, à deux aspects fondamentaux :

- L’accès aux prestations de santé, et donc leur disponibilité, - Leur qualité.

En effet, il ne sert à rien d’avoir un bon accès à des soins si ceux-ci sont de médiocre qualité et qu’ils ne soulagent pas. De même, à l’inverse, il ne sert à rien de proposer des soins de qualité si ceux-ci restent inaccessibles, que ce soit pour des raisons financières ou pour des raisons d’éloignement.

8.2.2. Dimension « Enfance : alimentation, éducation & santé »

L’enfance concerne lui aussi un domaine très vaste. A ce stade-ci de son élaboration, la politique nationale de Protection Sociale en RDC concentre ses efforts sur trois cibles d’égale importance : l’alimentation des enfants, leur santé et leur éducation. Par éducation, il faut principalement comprendre l’éducation scolaire, même si par ailleurs certains aspects de l’éducation familiale peuvent être envisagés.

8.2.3. Dimension « Revenus pour les personnes en situation difficile »

Si la Protection Sociale s’adresse à tous les citoyens Congolais, en pratique, elle prend cependant particulièrement soin des pauvres et des plus vulnérables, c’est-à-dire de manière générale les catégories les plus exposées aux risques et à leurs conséquences.

S’agissant des revenus, il s’agit entre autres des catégories suivantes :

Les pauvres chroniques ou structurels, ceux qui sont en difficulté quelle que soit la conjoncture, Les pauvres transitoires, qui sont le plus souvent ceux qui vivent proches du seuil de pauvreté et qui ont à faire face à une difficulté temporaire ou conjoncturelle, Les personnes qui vivent avec un handicap ou qui sont affectée par une caractéristique ou un statut particulier qui les met en difficulté et qui exige une aide spécifique

A côté de ces catégories, il y a aussi les indigents, c’est-à-dire les personnes qui ont perdu leur capacité à subvenir à leurs besoins les plus élémentaires, temporairement ou de manière définitive.

8.2.4. Dimension « Troisième âge »

Depuis une décennie, un nombre grandissant de personnes accède au troisième âge, c’est-à-dire, conventionnellement, à l’âge de 60 ans (pour les femmes) ou 65 ans (pour les hommes). D’un côté, il faut s’en réjouir. Mais, d’un autre côté, la RDC se trouve devant la nécessité de prendre soin de cette catégorie émergente qui a des besoins spécifiques qui ne sont pas toujours proprement pris en compte. La quatrième de la Protection Sociale en RDC prend en charge ce défi.

8.3. Cinq piliers : définition, objet, champ d’application

8.3.1. Gouvernance

Ce premier pilier concerne toutes les dimensions habituelles de la gouvernance telle qu’elles sont établies à la section 2.3. Les questions clefs tournent autour de la répartition des rôles, attributs et responsabilités.

La qualité des décideurs et celle de leurs décisions importent beaucoup. Il en va de même pour les cadres où les décisions sont prises : de leur fonctionnalité dépend le sort des efforts investis dans la protection sociale.

8.3.2. Financement

Le financement, en matière de Protection Sociale en RDC, recoupe trois fonctions : la collecte de fonds, leur gestion et leur redistribution (ou allocation).

La préoccupation dominante est celle de disposer en temps utile des moyens financiers nécessaires à la réalisation des missions de Protection Sociale. Les prélever au bon endroit, au bon moment, en juste proportion, conformément aux cadres normatifs existants, conditionne les performances de la collecte.

Avoir les ressources financières à portée de main ne suffit pas. Elles doivent être proprement gérées de manière à être disponibles au moment où on en a besoin. Ensuite, elles doivent être allouées aux diverses prestations, transferts ou services, en fonction des priorités décidées par les autorités compétentes, conformément aux procédures, règles et normes en vigueur.

8.3.3. Renforcement des capacités

Le renforcement des capacités concernent deux domaines séparés : d’une part le renforcement des capacités humaines, d’autre part le renforcement des capacités opérationnelles et techniques.

Le premier domaine s’intéresse aux compétences des prestataires et à leur capacité de faire face aux multiples situations qu’ils rencontrent dans l’exercice de leur spécialité. Le second soulève la question des moyens, outils et dispositifs à la disposition des prestataires de manière à ce qu’ils puissent faire efficacement leur travail.

La Protection Sociale est un secteur en développement dont les performances et l’efficience dépendent beaucoup de la mise en œuvre d’innovations technologiques appropriées.

8.3.4. Recherche, innovation, suivi, évaluation

La qualité et le développement de la Protection Sociale en RDC dépendent d’une bonne connaissance des terrains où elle est mise en œuvre mais aussi d’une compréhension fine de ce qu’elle déclenche dans la vie des populations à qui elle s’adresse. Elle demande également une grande maîtrise de son économie, ce qui nécessite d’investiguer ce qu’elle coûte en regard des services qu’elle rend ou des transferts qu’elle active. En même temps, il est important de comprendre dans quelle mesure, de quelle manière, à quelles conditions elle alimente le cercle vertueux qu’on lui attribue dans le domaine de l’économie.

L’avenir et l’évolution de la Protection Sociale en RDC dépendent des innovations qui seront introduites. Ce qui signifie qu’il faut repérer mais aussi évaluer les innovations, que ce soit des innovations endogènes ou exogènes. Dans les deux cas, elles exigent d’être mises à l’épreuve avant d’être validées et diffusées.

La Protection Sociale exige d’être performante, efficace et efficiente. Elle doit s’élever à hauteur des défis humains qu’elle aborde. Elle mobilise des ressources rares qui exigent d’être allouées aux meilleures fins, mesures, actions ou prestations. C’est pourquoi un suivi vigilant et précis doit être mis en place, non seulement pour savoir ce qui a été fait, où, sur quelle période, au bénéfice de qui, mais aussi pour savoir ce que les prestations, services ou transferts ont pu provoquer.

De même, il est nécessaire d’évaluer les actions, mesures, prestations, dispositifs et instruments, notamment pour en tirer des leçons.

8.3.5. Information et éducation citoyenne

Le succès de la Protection Sociale en RDC repose sur la bonne connaissance du public auquel elle s’adresse. En réalité, c’est toute la population congolaise qui est concernée, quelle que soit la région, quelle que soit la classe sociale. C’est dire si le défi est grand.

Les questions clefs sont les suivantes : comment faire pour que les destinataires de services sociaux ou de transferts connaissent leurs droits et devoirs ? Comment faire pour qu’ils comprennent la Protection Sociale, ses vocations, ses missions et son fonctionnement ? Comment faire pour qu’ils s’y intéressent et en viennent à la soutenir ?

Ce pilier s’attache en particulier à la mise au point d’une stratégie de communication en matière de Protection Sociale, à toutes les échelles, en tenant compte de la diversité des publics et des situations.


Convaincu qu’une Protection Sociale solide est une nécessité politique, économique et sociale car elle est une condition nécessaire à une croissance durable inclusive, le Gouvernement de la République Démocratique du Congo, s’est engagé, en collaboration avec ses partenaires sociaux et à travers un processus de dialogue social à améliorer rapidement le niveau de la Sécurité Sociale pour tous les congolais et de façon particulière pour les acteurs œuvrant dans l’économie informelle, dans les zones rurales, dans les emplois occasionnels, avec une grande attention au genre. Il est important de considérer les Socles de Protection Sociale ( SPS) comme des programmes définis à l’échelle nationale qui garantissent à tous l’accès aux soins de santé essentiels comme la maternité et offre une sécurité de revenu pour les enfants (qui leur permet d’avoir accès à la nourriture, à l’éducation et à d’autres biens et services) et pour les personnes en âge de travailler dont le niveau de revenus n’est pas suffisant ainsi qu’à toutes les personnes âgées (Bureau régional de l’OIT pour l’Asie et la Pacifique, 2013).

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