I. Que faire pour...
En juin 2012, l’OIT adoptait la recommandation 202 sur les socles de protection
sociale, après que la question soit progressivement revenue à l’ordre du jour dans
les grandes agences onusiennes telles l’UNICEF et l’OMS, et même à la Banque
Mondiale.
Dès 2005, l’Assemblée Mondiale de la Santé, déclarait1 :
« Tout individu doit pouvoir accéder aux services de santé sans être confronté à des difficultés
financières. L’obligation de payer directement pour des services au moment du
besoin même, empêche des dizaines de millions de personnes de recevoir les
soins médicaux qui leur sont nécessaires… ». Ainsi la couverture universelle en
santé était-elle mise à l’ordre du jour, suite au constat d’une situation sanitaire
désastreuse dans de nombreux pays du Sud : « Si dans les pays développés, la
proportion des accouchements assistés atteint près de 100% (et les taux de
mortalité maternelle sont les plus faibles), dans certains pays, cette proportion
peut être inférieure à 10%. Les mêmes variations peuvent être observées à
l’intérieur même des pays selon qu’on appartient à la classe supérieure ou aux
classes populaires. »2.
Comment agir concrètement dans une situation telle que celle que vit la
République Démocratique du Congo (RDC) ? Mise en perspective par un acteur
engagé dans le développement des mutuelles de santé.
La RDC figure parmi les pays les plus pauvres au monde malgré une richesse abondante
du sol et du sous-sol. Plus de 75 % de la population vit sous le seuil de pauvreté.
L’espérance moyenne de vie y est d’une cinquantaine d’années. La mortalité infantojuvénile
reste très importante (158/1.000 naissances vivantes) ; les épidémies
(rougeole, choléra…) y causent toujours la mort. On compte encore plus de 550 décès
maternels sur 100.000 naissances et on estime à 150 à 200.000 les décès d’enfants de
moins de 5 ans à cause du paludisme…
Le secteur de la santé y est en situation critique : l’offre de soins est insuffisante et de
faible qualité, l’accès aux soins est difficile pour la grande majorité, tant pour des raisons
culturelles et géographiques que financières. Les tarifs pratiqués sont excessifs, hors
contrôle. Selon les comptes nationaux de la santé, les dépenses de santé/an/habitant
étaient en 2012 de treize dollars. Sur ces treize dollars, sept sont à charge de la population,
c’est-à-dire des malades3. Dans l’ensemble, les prestations des services et
soins de santé sont médiocres. Seuls 8% des hôpitaux généraux de référence (HGR)
disposent d’un plateau technique pour la chirurgie, 6% d’entre eux pour l’obstétrique. Le
pourcentage de faux médicaments (sans principe actifs, faux ou périmés) est estimé à
plus de 80%. Ainsi, en avril 2013, une opération menée dans les principaux ports
maritimes africains a-t-elle abouti à la saisie de 550 millions de doses de médicaments
illicites, potentiellement dangereux voire mortels selon l’Organisation Mondiale des
douanes.
Naturellement, la qualité douteuse des prestations entraîne la baisse de fréquentation et
d’utilisation (on estime entre 0,15 et 0,30 le nombre de consultations/an/habitant là où
la norme OMS est 1).
Deux tiers des malades n’ont pas recours au système de santé
formel, pour cause de non disponibilité, de mauvaise qualité ou de coûts trop élevés.
Autrement formulé, si 30% ont recours au réseau de santé public ou confessionnel, 40%
pratiquent l’automédication, 9% vont chez les guérisseurs traditionnels, 21% ne font
rien.
L’accès à l’eau potable est loin d’être généralisé, (seulement 26% de la population en
2014) ; le problème de l’assainissement des milieux de vie à forte densité de population,
ou celui des latrines, restent des défis considérables.
Le droit du travail pose lui aussi problème, notamment quant aux questions relatives aux
maladies professionnelles ou les accidents de travail, les normes environnementales, les
normes qualité (et/ou leur contrôle) des produits de consommation alimentaire,
l’utilisation de produits toxiques dans l’exploitation industrielle de minerais, (le cyanure
est utilisé massivement pour l’exploitation industrielle de l’or).
Dans le secteur de la
santé, les normes de sécurité pour l’utilisation des appareils de radiologie, ou l’agrément
pour l’exploitation de pharmacies… sont obsolètes, n’existent pas ou ne sont pas
appliquées.